Droit fiscal

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Imposition des entreprises

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Imposition des entreprises

La fiscalité des entreprises suisses fait l’objet d’importantes modifications depuis une vingtaine d’années. Cette tendance a mené à deux réformes majeures en 1997 et 2007. Une troisième réforme, très attendue, est actuellement en discussion au Parlement. La présente newsletter entend fournir un bref état des lieux de la situation. Après avoir rappelé brièvement le contexte historique, nous détaillerons les principales mesures envisagées, les prochaines étapes et la position actuelle des cantons de Genève et de Vaud.

I. CONTEXTE

La fiscalité des entreprises fait l’objet depuis les années 90’ d’importantes réformes visant à améliorer l’attractivité fiscale des sociétés en Suisse.

En 1997 déjà, la première grande réforme a notamment (i) étendu la réduction pour participations aux gains en capital, (ii) éliminé l’imposition du capital au niveau fédéral, (iii) introduit un impôt proportionnel sur le bénéfice de 8,5 % et (iv) baissé le droit de timbre d’émission de 2 % à 1 %.

La deuxième réforme de 2007, qui fut acceptée de justesse par référendum à 50.5%, visait plus spécifiquement l’atténuation de la double imposition économique en mettant en place un système d’imposition partielle des dividendes et en améliorant à nouveau les conditions applicables à la réduction pour participations. Cette réforme a également (i) allégé les conditions de perception du droit de timbre d’émission, (ii) introduit le principe de l’apport en capital et (iii) mis en place toute une batterie de mesures permettant de réduire l’imposition des entreprises de personnes dans des phases de transition.

Sur le plan international, le système suisse d’imposition des entreprises fait l’objet de pressions croissantes. Celles-ci se sont intensifiées depuis la crise financière de 2007 et le lancement du projet BEPS (Base Erosion and Profit Shifting) en 2013. En particulier, l’UE et l’OCDE critiquent les régimes d’imposition cantonaux applicables aux sociétés holding, mixtes et de domicile en estimant que ces modalités d’imposition faussent les principes de libre concurrence. Au niveau fédéral, les traitements fiscaux applicables aux sociétés principales et aux succursales financières sont également passés sous la loupe.

C’est dans ce contexte que s’inscrit la troisième réforme des entreprises. Celle-ci fut déjà initiée en 2008 par le Conseil fédéral. Après une longue procédure de consultation, le Conseil fédéral a communiqué au parlement son message le 5 juin dernier.

II. TROISIEME REFORME DES ENTREPRISES (RIE III)

A. Objectifs et principales mesures

Selon la formulation même du Conseil fédéral, la RIE III a pour but de concilier divers objectifs partiellement contradictoires, à savoir, d’une part, le maintien la compétitivité fiscale suisse tout en assurant sa reconnaissance au plan international et, d’autre part, la sauvegarde des intérêts fiscaux de la Confédération, des cantons et des communes.

Diverses mesures fiscales sont ainsi proposées. Parmi les plus importantes, on peut notamment citer:

–     La suppression des régimes fiscaux cantonaux ;

–     L’adaptation des pratiques administratives fédérales de répartition relatives aux sociétés principales et aux succursales financières ;

–     L’introduction d’une patent box à l’échelon cantonal pour les brevets et autres droits analogues permettant d’accorder un dégrèvement maximal de 90% sur les bénéfices ainsi obtenus ; 

–     L’autorisation pour les cantons de prévoir des déductions fiscales accrues au profit de la recherche et du développement ;

–     La possibilité pour les cantons de prévoir une imposition réduite du capital propre lié à des brevets ou des droits analogues ainsi qu’à des droits de participations ;

–     La suppression du droit de timbre d’émission sur le capital propre ;

–     L’imposition partielle des dividendes uniforme au plan cantonal et fédéral et limitée à 30% ;

–     L’introduction de mesures générales encadrant la réévaluation et l’amortissement ultérieur des réserves latentes (step-up).

A signaler que diverses mesures abordées lors de la procédure de consultation n’ont finalement pas été retenues dans le message. Il s’agit notamment des mesures suivantes :

–     La déduction fiscale portant sur des intérêts notionnels ;

–     L’imposition des gains en capital provenant de l’aliénation de titres appartenant à la fortune privée.

Le Conseil fédéral propose enfin des mesures de compensation « verticales » entre la Confédération et les cantons afin de mieux répartir le coût de la réforme et de la baisse des taux d’imposition cantonaux (cf. chapitre II.B.). La part cantonale au produit de l’impôt fédéral direct devrait ainsi passer de 17% à 20.5%.

B. Position des cantons de Vaud et Genève

Avec l’abandon des statuts fiscaux, les cantons se doivent de réagir s’ils veulent maintenir leur attractivité fiscale sur le plan international. Ceci est particulièrement vrai pour les cantons de Vaud et de Genève où de nombreuses sociétés multinationales au bénéfice desdits statuts se sont implantées ces dernières années. Ainsi, et sans attendre la fin de la procédure législative fédérale, le Grand conseil vaudois a déjà adopté en septembre 2015 la RIE III en confirmant la baisse du taux d’imposition unique du bénéfice des entreprises à 13.79% dès 2019. L’objectif de cette anticipation est de fournir un message clair et de rassurer les entreprises internationales dans un contexte incertain. Ceci fera toutefois l’objet d’un référendum au niveau cantonal courant 2016. Le Conseil d’état genevois a, quant à lui, estimé qu’il était prématuré de déposer un projet de loi de mise en œuvre de la RIE III. Il a toutefois également confirmé sa volonté de mettre en place un taux d’imposition unique sur le bénéfice d’environ 13%.

C. Processus

Il est probable que les débats parlementaires au niveau fédéral se terminent courant 2016. En l’absence de référendum (peu probable en l’état), les modifications légales pourront déjà entrer en vigueur le 1er janvier 2017 avec une période transitoire de deux ans permettant aux cantons d’adapter leur législation.

III. CONCLUSION

Le processus législatif est toujours en cours. Les mesures décrites dans le message pourront donc encore faire l’objet d’importantes modifications. Vu l’ampleur de la réforme et les âpres réactions qu’elle soulève politiquement, il est probable qu’elle fasse l’objet d’un référendum au niveau fédéral courant 2017. Il est toutefois difficile de se prononcer à ce jour sur l’issue d’une telle votation notamment au vu de la faible acceptation de la deuxième réforme de 2007. Les résultats du référendum cantonal vaudois de 2016 pourront donner un indice très utile dans ce contexte. Malgré ces incertitudes, l’ampleur des mesures et leur nécessité de reconnaissance sur le plan international doivent néanmoins inciter les entreprises à se tenir informées des derniers développements et à anticiper les effets de la réforme.

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